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Chambord (2)

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Chambord (2)

 

 

Précédent : Chambord (1)

 

 

Quercus robur… Il est surprenant comme une locution latine accolée à un raisonnement, par simple comparaison, illumine la pensée, éclaire des impressions que l’on aurait du mal à classifier en général. Maintenant la cour intérieure comme terrain de divagations visuelles, deux tours envahissent l’espace de leurs énormités ; elles rappellent de vieux arbres remarquables croisés au hasard dans la campagne. En présence de ce type de réalisation humaine, on aime à s’avancer jusqu’à leurs bases, en apprécier la hauteur, à se sentir écrasé par eux, à avoir ce mélange désagréable et fascinant d’une grandeur qui croît à mesure qu’on en approche. Les deux tours donc, de ce qui fut indubitablement un castel médiéval, une fois collé à leurs pierres de Bourré, le menton tendu vers le ciel, on contemple la canopée formidable qui s’épanouit à leurs sommets. Le regard vers ces cimes, une écorce jaunâtre accompagne l'ascension, apporte chaleur, réconfort, jusqu'à des fragments d’ombres projetés, des négatifs d'entrelacs de pignons, pinacles, cheminées, gargouilles en surplomb.

Pourtant, bientôt, à cette chaleur générée au dehors succède la froideur d'un intérieur. Surpris, on se confirme à soi-même l'axiome comme quoi, en quelques pas, une réflexion précédente peut-être chassée avec autant de célérité qu’un vent d’automne balaie des feuilles mortes. La remarque vérifiée, elle s’accentue même., et peu de secondes dans ces entrailles suffisent à balayer le caractère printanier que l’imagination avait pourtant si méticuleusement élaborée. Le contraste, brutal, on clôt la fermeture d'un anorak en guise de réponse, on délaisse l’objet de la visite, se concentre sur une volumineuse cheminée noircie par une suie surabondante. Il faut dire que les murs glabres et blanchâtres n’incitent guère à la jubilation, et Chambord ne fait pas exception dans la liste interminable des bâtiments dont le principal intérêt réside dans les extérieurs et quelques éléments d’architectures. Aussi, le château dépourvu de son âme, on se défait rapidement de scènes de chasse, de portraits de plain-pied fades et de peu de mérites ; la bâtisse est devenue le seul stimulus à des sensations. Dans ce presque désert artistique, on s'abandonne sur des tapisseries accrochées aux parois des quatre bras articulés autour de l’escalier central, une église en croix grecque si on veut visualiser la structure générale... La constatation en rien fortuite, elle trouve son origine dans les frustrations d’un monarque propagandiste, bélitre, incapable de modérer sa langue, qui a reproduit ici les plans de la nouvelle basilique Saint-Pierre, érigée sous les recommandations de Bramante. Fier-à-bras persuadé d’avaler le monde, jugé incompétent pour le titre d’empereur, dont Marignan fut un succédané au regard du désastre de Pavie, de l’emprisonnement qui suivit, de sa libération, qui coûta une année fiscale entière, sans doute pensa-t-il laver ses affronts successifs par une politique dite évergétique. Réussit-il dans son entreprise ? L’histoire oscille selon les époques où on la raconte… La seule certitude est que vingt-cinq ans durant, mille-huit-cents ouvriers s’éreintèrent à faire jaillir ce corps du logis central, ces appartements et un oratoire.

Mais on laisse le gros garçon à l'esprit épais, jadis raillé et chansonné par ses sujets, pour le fameux escalier au centre du château. Il est plein de charmes et de finesses ce long alignement de degrés qui s’enroule en spirale autour d’un pilier évidé. Il faut le parcourir plusieurs fois, de haut en bas, du rez-de-chaussée jusqu’au dernier étage, pour en apprécier les décorations, et en comprendre l’ordonnancement. D'humeur vagabonde, la première montée s’occupe essentiellement de l’étude des rampes extérieures, lisses, sur lesquelles les doigts fuient comme sur du velours. Des pauses interrompent la marche, de belles occasions pour disséquer du regard des chapiteaux de pilastres, bas-reliefs d'animaux chimériques, de putti, des rinceaux... une touche florentine importée. Plus en amont, le rampant s’ouvre sur des grandes salles ; on y reviendra. On poursuit. L'escalier percé de jour, zébré par d’autres rambardes qui croisent la rampe principale, les extérieurs se strient de barres, l'intérieur donne l’impression d'être enfermé en une cage. A nouveau un pallier, le second étage. On se laisse happer. Sur des voûtes partagées en caissons on a sculpté des salamandres, des F différemment couronnés, des nœuds mystiques du cordon de Saint-François. On sait combien l’animal capable de vivre dans le feu, la salamandre, de s’en nourrir, de l’éteindre aussi par sa froidure, fut la devise de François Ier ; et partout il vomit des flammes, serpente le long des murs, sur des portes bien ciselées. On dit, mais est-ce là une légende ?, que l’escalier et les salles qui l’entourent étaient visibles depuis le bas dans leur intégralité au départ, sans planchers, vu comme un immense pertuis mis à nu, pour permettre la contemplation de ces voûtes décorées depuis le bas, un  peu identique à celui d'Orvieto, dont on parlera un jour à l'occasion... 

Le chemin maintenant à rebours, on descend, se focalise sur le tronc central évidé. Des embrasures offrent un dérivatif au regard. On y ose des regards indiscrets. Toujours candide, on est interpellé par ce vide. Puis un visage, un inconnu que jamais on ne reverra,  jaillit à l’opposé, à une hauteur similaire à la nôtre. C'est alors qu'on comprend toute l’ingéniosité de la savante construction, laquelle superpose deux escaliers à double vis, deux rampes superposées, déroulées en hélices, passant l’une par-dessus l’autre sans jamais se réunir, une personne montant, l'autre descendant, jamais elles ne se croisent, une sorte de tire-bouchons à double branches, voici à quoi ressemble l'escalier monumental...

 

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