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Vicenza (4)

Vicenza (4)

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Castello construit par les Padouans, avant que Vicenza ne soit libérée de ce joug par les Scaliger. Il est le site du Teatro Olimpico imaginé par Palladio et classé au patrimoine de l'humanité par l'Unesco

Castello construit par les Padouans, avant que Vicenza ne soit libérée de ce joug par les Scaliger. Il est le site du Teatro Olimpico imaginé par Palladio et classé au patrimoine de l'humanité par l'Unesco

Vicenza (4)
Odéon

Odéon

Antiodéon

Antiodéon

Lampes à huile créées par Scamozzi pour éclairer la scène

Lampes à huile créées par Scamozzi pour éclairer la scène

Vicenza (4)
Cavea (Amphithéâtre elliptique) composée de gradins en bois

Cavea (Amphithéâtre elliptique) composée de gradins en bois

Skénée conçue sur le modèle des Théâtres antiques

Skénée conçue sur le modèle des Théâtres antiques

Les trois ouvertures classiques du théâtre antique. Le décor à l'arrière de la Skénée est d'origine, réalisé par Scamozzi, il joue sur la perspective et l'illusion de profondeur, et figure Thèbes, lieu de la tragédie d'Oedipe-Roi, de Sophocle

Les trois ouvertures classiques du théâtre antique. Le décor à l'arrière de la Skénée est d'origine, réalisé par Scamozzi, il joue sur la perspective et l'illusion de profondeur, et figure Thèbes, lieu de la tragédie d'Oedipe-Roi, de Sophocle

Porte latérale qui ouvre sur le proscenium (scène) et l'orchestra

Porte latérale qui ouvre sur le proscenium (scène) et l'orchestra

Autre porte latérale

Autre porte latérale

Ouverture principale fermée par un rideau lors de représentations

Ouverture principale fermée par un rideau lors de représentations

95 statues peuplent le théâtre et représentent des personnages liés à la fondation de l'Académie ou du théâtre lui-même

95 statues peuplent le théâtre et représentent des personnages liés à la fondation de l'Académie ou du théâtre lui-même

Vicenza (4)
Skénée faite de colonnes d'ordre corinthien qui s'inspire pour partie des arcs de triomphe romains, à trois arcs

Skénée faite de colonnes d'ordre corinthien qui s'inspire pour partie des arcs de triomphe romains, à trois arcs

Les douze travaux d'Hercule

Les douze travaux d'Hercule

Vicenza (4)
Hoc opus, hic labor est, écrit tout en haut, au-dessous un cirque avec une course chars, symbole de l'Académie

Hoc opus, hic labor est, écrit tout en haut, au-dessous un cirque avec une course chars, symbole de l'Académie

Vicenza (4)
Vicenza (4)
Cavea. Les femmes étaient placées au bas de celle-ci, emplacements dédiés aux sénateurs dans l'Antiquité, les hommes occupant les gradins supérieurs

Cavea. Les femmes étaient placées au bas de celle-ci, emplacements dédiés aux sénateurs dans l'Antiquité, les hommes occupant les gradins supérieurs

Loggia supérieure ornée de 28 statues représentant les fondateurs de l'Académie Olympique

Loggia supérieure ornée de 28 statues représentant les fondateurs de l'Académie Olympique

Vicenza (4)
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Vicenza (4)
Vicenza (4)
Vicenza (4)
Vicenza (4)
Vicenza (4)
Vicenza (4)

 

Thêatre Olympique

 

 

Précédent : Vicenza (3)

 

 

Hoc opus, hic labor est…

 

A si peu de distance de Mantova, comment ne pas évoquer ces vers de Virgile tirés de l’Enéide, lesquels furent la devise d’une ancienne institution culturelle fondée en 1555 par un groupe de nobles et d’intellectuels auquel Palladio appartint. L’Académie, tel fut le nom de ce groupe de personnes qui promut diverses disciplines et activités artistiques, accordant une attention particulière à la culture, à la vie artistique et au progrès de la cité de Vicenza. Née d’une vague de cercles intellectuels en vogue en Italie entre quatorze-cents et quinze-cents, celui de Vicenza, tenu par Gian Giorgio Trissino, fut l’un des plus célèbres, un précurseur peut-on dire rétrospectivement. Tous les arts, de la musique, à l’étude des mathématiques, l’exercice des armes, l’équitation… faisaient alterner les membres dont les contributions étaient lues lors de réunions. L’une de leurs activités préférées fut celle des représentations théâtrales. Palladio s’occupait des préparatifs, confectionnait des scènes improvisées dans des sites provisoires. L’idée de quelque chose de plus stable, d’une situation ferme à l’équilibre durable, se bâtit dans l’esprit des universitaires. Les bords de la Bacchiglione exhaussèrent leur souhait, la zone du Castello plus précisément, une vieille fortification débutée par les seigneurs de Padova, et devenue inutile en cette paix passagère. En vertu de matérialités sonnantes et trébuchantes, une partie des salles utilisées pour des fins non militaires, ils se réservèrent ce bout de superficie. Et aujourd’hui, les traits altérés jusqu’à les rendre peu connaissables, on se demande ce qu’il reste du fortin naguère rébarbatif ? Une tour… crénelée. Une conservation mal assurée qui, passé un porche usé, ouvre sur une cour intérieure bucolique, un presque jardin. Gonflée de verdures, on en parcourt le circuit, s’imprègne des parois âgées, de la physionomie de statues, allégories des arts, chacune à son tour portant sur son visage une expression douce, de convenance, noble pour les moins détériorées…

Pour les candides, les naïfs, les non avertis de l’Italie qui calqueraient des poncifs étrangers sur les bâtiments, rien ne soupçonne la présence de quelque monument remarquable. Et pourtant… Le seuil de la billetterie franchie, des fresques en trompe-l’œil dans un Odéon, une frise en grisailles qui court sur tout le périmètre d’un Antiodéon à l’écotone du plafond, déjà, comme sur les premières marches de l’escalier d’un praticable, perdu dans les coulisses, on sent la pièce de prestige qui passionne et en impose a priori

On n’est pas trompé, séduit même par une apparence qui donne plus qu’elle avait promis.

Même si Palladio fut décédé avant sa réalisation, l’architecte a travaillé en archéologue. Vitruve lui a fourni la documentation qui lui manquait, les murs des théâtres romains les exemples dont il s’est inspiré. Il en résulte un étonnant monument qu’on parcourt encore dans son premier état, avec des gradins en demi-cercle, sa scène surélevée derrière l’orchestre, coupée en son milieu, et surtout son magnifique mur du fond qui s’ouvre par deux portes latérales et une grande porte centrale sur des enfilades de rues et de palais construits en trompe-l’œil. Peut-être dernier théâtre antique ? Le théâtre de Palladio, avec le toit qui le couvre, sa voûte qui simule un ciel d’été, est le premier théâtre moderne qui fut construit. Tout l’édifice est en pierre de taille, à l’exception des gradins et du plafond, qui sont en bois. Malgré les vices qui résultent de l’immobilité de la scène, avec la disposition de ses rues de Thèbes, la salle est majestueuse et sonore. Et grimpant au sommet des degrés, sous le couvert d’une colonnade corinthienne, entremêlée de niches, avec un grand nombre de statues, qui couronne l’amphithéâtre, on s’assied, imagine la tragédie la plus noble qu’on eût jamais écrite, Œdipe- Roi, de Sophocle, la musique des chœurs confiée à l’organiste de Sain-Marc à Venise, Andrea Gabrielli, lors de la première pièce jouée ici en 1585.

Etonnant spectacle qui attira alors une foule immense, qu’on dut donner une seconde fois, disent les annales. Les acteurs, membres de l’Académie, étaient habillés à la mode grecque, à l’orientale à l’époque ; Œdipe entouré d’une garde de vingt-quatre archers, habillés comme ceux du sultan de Turquie, d’une quantité de pages et de seigneurs ; Jocaste accompagnée de ses dames d’honneurs ; Créon avait aussi une suite proportionnée à son rang… Ce fut au total cent-huit personnages qui évoluèrent sur le proscenium avec un ordre et une perfection qui firent l’admiration des spectateurs. Ce fut là, dans la matrice des théâtres à venir, que l’on entendit de nouveau la puissance du destin, telle que les anciens la concevaient, redoutable ; un homme conduit irrésistiblement, par la seule fatalité qui s’attache à lui, à commettre les crimes les plus effroyables, les plus inouïs ; à tuer son père ; à devenir l’époux de sa mère ; et cela, sans cesser d’avoir le cœur pur et d’être innocent d’intention…

Hélas ! Hélas ! Qu’il est terrible de savoir, quand le savoir ne sert de rien à celui qui le possède... Tirésias avait raison…

Et tout cela sous les regards pleins de sagesses de statues prodiguées par dizaines pour l’embellissement du théâtre, comme le suggérait Pline ; sous un luxe décoratif aussi, un abus de richesses, qui a semblé ne pas connaître de termes, et dont on se régale une heure durant, changeant en régulier de positions pour varier les perspectives…

 

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