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DOL DE BRETAGNE

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mont Dol

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DOL DE BRETAGNE
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DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE
maison des plaids

maison des plaids

DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE
DOL DE BRETAGNE

 

Dol-de-Bretagne

 

 

Perdu au milieu des conquêtes sur la mer, isolé au sein de prairies plantées de pommiers, baignées par un inépuisable lacis de ruisseaux, le Mont Dol, pendant du Mont Saint-Michel, soixante-cinq mètres par-dessus l’Océan, immerge dans une Celtie où le mythe s’impose à l’histoire, où la légende, cruelle ou dorée, supplante une vérité que l’historien n’arrivera plus à reconstruire…

 

S’enfouissant dans un lit d’argent, le soleil repousse avec peine le crépuscule projeté sur la baie. Posé sur une boursoufflure du rocher, un moulin remarquable plie ses ailes, il a achevé sa course diurne et saccadée. Et moi ! Perché au sommet d’une petite tour de la petite montagne, j’observe les campagnes pélagiennes mornes et muettes, frontières indécises sans fin, qui s’allongent vers les monticules minuscules des îles Chausey, la pointe du Grouin, le Mont Saint-Michel... Tout près, en contrebas, de vieux châtaigniers asséchés et vénérables étirent leurs bras nus. A demi penchés, usés par le temps, leurs troncs nouailleux plient vers leurs racines torses.

« Tout est mystère dans cet univers silencieux ! ». Les arbres… si âgés, trop fatigués pour porter des feuilles ombrageuses, semblent les derniers survivants de la forêt légendaire de Scissy emportée en 709 par un raz-de-marée. « Illusions ! »… Des griffes gigantesques ont lacéré la pierre, les empreintes d’un pied géant ont creusé la roche. Ici l’Archange affronta le Malin, prenant appui sur le roc pour bondir à la poursuite du Démon déjà sur un autre mont, Saint-Michel...

 

Je me retourne... Maintenant dos à l’Océan, au loin, au bord d’une falaise de vingt mètres, j’aperçois une cité qui, venu de Normandie, peut s’enorgueillir d’être la première de Bretagne. C’est Dol ! Une ancienne ville côtière jusqu’au XIIème siècle, à présent reculée dans les terres, offrant aux passants des trésors d’un temps passé…

Ce bourg, c’est une rue, une longue et large coulée coupée de quelques ruelles. Sa vaine centrale était jadis entièrement bordée de maisons à porche, de galeries couvertes de chaque côté. Maintenant, elle a beaucoup perdu, nombre de porches ont disparu… Par bonheur, le flanc à l’abri du vent conserve toujours quelques-unes de ces reliques, alignées sous une longue série de maisons qu’entrecoupent de maigres intervalles. Une fois dessous ces vestiges sauvegardés, sous ces poutres vieilles et vermoulues, je contemple les piliers de toutes formes, de tous styles, aux chapiteaux romans et gothiques.

Puis voici l’endroit le plus étendu de la Grande Rue. Le tunnel à demi ouvert que j’empreinte ouvre dans son fond, derrière de lourdes portes antiques, sur une courée dominée par la masse sombre d’une tour octogonale chapeautée d’une poivrière. A la même place, mais de l’autre côté de la rue, une maison romane du XIIème siècle, la maison des Plaids, une des plus vieilles habitations de France, s’extrait distinctement de l’environnement des demeures contiguës. Sa façade de granit, cariée par les embruns de l’Océan, comprend au rez-de-chaussée une large arcature aux dessins géométriques en dents de scie ; un figuré qu’elle reproduit dans de moindres dimensions autour des embrasures du haut.

 

Dans ma découverte du village, des venelles, à l’impromptu, dévoilent des perspectives d’autrefois. Je pénètre dans l’une d’entre-elles ; jusqu’à, une fois dégagée d’un pêle-mêle de basses constructions aux toits moussus, tomber nez-à-nez devant la cathédrale.

« Quelle surprise ! Pour une aussi petite ville que Dol, la taille de l’édifice a de quoi déconcerter ! ». C’est qu’ignorant, je ne connais pas assez l’histoire de la Bretagne, car Dol fut un archevêché métropolitain d’Armorique, avant de devenir simple évêché au XIIème siècle ; c’est ici, aussi, que fut couronné le premier roi de Bretagne, Nominoë.

La place enviée des archevêques, puis évêques de Dol, qui influèrent tant sur l’histoire de la Bretagne, fut liée à une apparition mystérieuse. Un certain Samson, un de ces nombreux saints fondateurs qui traversa la Manche, accosta au IVème siècle dans ce désert dédié alors aux forêts et marais. Le seigneur local, dont l’histoire tait le nom, avait pour femme une lépreuse et une fille possédée par le démon, mais il fit à l’ermite un accueil chaleureux. Touché, malgré ses malheurs, par une telle attention, le futur saint se mit en devoir de guérir les souffrances des deux femmes alitées… Comme de coutume dans les écrits hagiographiques, le prodige eut lieu… et le gentilhomme, comblé de ces bienfaits, offrit un fief en échange. La terre nue se couvrit bientôt d’un monastère, une clôture de laquelle naquit Dol ; la cité conservant dans son nom le souvenir des afflictions des deux femmes guéries.

Sur les fondations de l’abbaye, plus tard on construisit la cathédrale. Mais, jamais, elle ne fut réellement achevée ; détruite, puis ressuscitée, par le même Jean-sans-Terre, sa conception la plus aboutie coïncida avec le XIVème siècle. Aujourd’hui, veuve de ses évêques, balayée par les vents, elle offre aux regardeurs une symphonie de pierres non terminée ; l’une des tours de la façade semble même s’être écroulée par chagrin.

J’entame mon tour extérieur du monument… Je débute par le nord, le côté, jadis relié au château, toujours crénelé à la façon d’un rempart. Je passe… Assez vite, j’abandonne cette face sombre et sévère pour l’autre flanc, plus gai, plus contrasté, orné de deux porches accolés. Le plus grand prolonge le transept, il l’étire même ; une élasticité qui me masque une réalisation inhabituelle ; un pertuis, à la cheminée en U, qui communique avec la sacristie. L’autre porche, plus petit, plus raffiné aussi, cache sous un fronton triangulaire deux belles arcades posées sur des colonnettes travaillées, un ensemble de rosaces et de feuillages finement sculptés dans une pierre blanche.

C’est par cet édicule que je pénètre dans la maison dédiée à Samson. A peine introduit, j’ai l’impression que l’espace se dilate, comme si la longue nef et le plafond aux voûtes croisées, s’étendaient au-delà des dimensions entrevues au dehors. « D’où me vient cette sensation ? Peut-être de la régularité des piliers cylindriques cantonnés de quatre colonnettes ? Peut-être de la sévérité des lignes, de ce chevet à fond plat, du déambulatoire aux angles droits ? ». Plongé dans la résolution de cette géométrie de pierres sombres et froides, quatre-vingts stalles m’apportent un peu de fantaisie. Des accoudoirs aux têtes humaines y côtoient des miséricordes animalières, des arcs tréflés, des rinceaux à volutes... des ébénisteries du XIVème siècle que conclut, d’un côté, un siège épiscopal imposant, gardé par des lions menaçants.

Presque en face du trône de l’évêque, encastré dans le bas-côté gauche, une douceur florentine, un tombeau à la mémoire de Thomas James, un des évêques de Dol à la fin du XVème siècle, déride un peu l’édifice à l’aspect si sévère. Justus de Florentinus, élève de Michel Colombe, serait l’auteur de ces rinceaux et sculptures qui courent le long de deux pilastres.