Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
SPAGGIA
SPAGGIA
Menu
Carsulae, la cité oubliée

Carsulae, la cité oubliée

Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Amphithéâtre construit sous les Julio-Claudiens

Amphithéâtre construit sous les Julio-Claudiens

Carsulae, la cité oubliée
Cavea et orchestra du théâtre, époque julio-claudienne

Cavea et orchestra du théâtre, époque julio-claudienne

chiesa San Damiano construite avec des matériaux de structures romaines

chiesa San Damiano construite avec des matériaux de structures romaines

Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Via Flaminia, 220 av. J-C, pour relier Rome à Rimini

Via Flaminia, 220 av. J-C, pour relier Rome à Rimini

Carsulae, la cité oubliée
un des arcs du forum

un des arcs du forum

tabernae (échoppes)

tabernae (échoppes)

Temples jumeaux des Dioscures (Castor et Pollux)

Temples jumeaux des Dioscures (Castor et Pollux)

Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Via Flaminia

Via Flaminia

Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Arc édifié sous Auguste, une des entrées de la cité

Arc édifié sous Auguste, une des entrées de la cité

Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
Carsulae, la cité oubliée
monument funéraire, environ Ier siècle

monument funéraire, environ Ier siècle

monument funéraire, environ Ier siècle

monument funéraire, environ Ier siècle

 

Carsulae

 

 

 

Précédent : Comme une grenouille au bord d’une mare

 

 

Fait du hasard ? Humeurs récurrentes du destin ? Comme si Carsulae voulait continuer à vivre isolée, les fonctionnalités d’un GPS s’évaporent d’une façon subite. Maintenant, seul face à mon désarroi, perdu entre Amélia et Terni, juste en compagnie de la débrouillardise ; laquelle, semble seule apte à résoudre le dilemme de l’itinéraire à suivre, les regards prennent le relais de la machine. Sans prétention aucune à la science de l’orientation, tantôt l’œil rivé sur l’asphalte, tantôt la vue projetée sur les sommets de collines, on s’imagine, sûr de ses initiatives, être sur l’ancien tracé de la via Flaminia.

Pareil au tribun de la Plèbe sachant, en son temps, contrer les prérogatives du Sénat pour désenclaver la région, et mettre aussi un point final aux prétentions des vieux peuples italiques, on pénètre dans l’ager gallicus la résolution chevillée au corps. Mais toujours point de signalétique, pas plus de panneaux propices à susciter l’espoir ; et alors que la logique voudrait que mes pensées s’orientent vers l’étude de la cité à venir, toutes mes capacités mémorielles cherchent en vain une trace susceptible d’indiquer le bon chemin. Enfin !... la force de la persévérance, la chance peut-être stimulée par l’opiniâtreté, une route cabossée aborde directement la cité désirée.

Blottie au pied des monts Martani, étalée sur une table creusée en son milieu, une ouvala où un amphithéâtre a pris place, la vétuste colonie étire ses monuments sur un horizon à peine ondulé, développant une géométrie orthogonale presque parfaite. Période éphémère d’une prospérité urbaine n’allant pas au-delà des règnes des Julio-Claudiens, le champ, de quelques hectares, porte sur ses herbes cramoisies les marques grises de bâtiments de jadis. Sans facéties, ni circonvolutions excessives, mais pourvus de quelques constructions, les preuves du sort réservé à la feu urbanité se matérialisent, fatalistes.

Ebranlé par les secousses d’un sous-sol sans cesse remodelé, par l’obsolescente bifurcation occidentale de la voie de pénétration, par la disparition des Sénons, Champenois d’origines ayant saccagé Rome, le vieux territoire a perdu de sa superbe. Touché par le déroulement inéluctable des évènements, les Celtes, pas davantage les Romains, n’ont su prendre assise sur l’isolat à l’écart de la plupart des grandes villes. Pourtant, des légionnaires repus de fatigues vinrent y poser leurs quartiers, appréciant les délices de ses vins chantés par Cicéron ; d’autres, plus aristocratiques, plus oiseux aussi, apprécièrent ses eaux réputées, baignant dans les piscines d’édifices thermaux dont, hélas, ils subsistent peu de choses.

Ni maîtresse de sa naissance, pas plus dépositaire de la date de sa mort, longuement la cité romaine a été abandonnée, laissée libre à la rapine et aux affres du temps, les deux fléaux endommageant irrémédiablement certains de ses édifices. Par bonheur, malgré sa fortune impossible, malgré son existence de moins de quatre-cents ans, dans un silence qui ne semble pas l’avoir quitté depuis mille-huit-cents années, la ville fantomatique conserve un ensemble scénique peu comparable.

Orientés vers la cime pointue d’une colline, dont on se demande si elle n’abrita pas une divinité tutélaire, tant elle écrase Carsulae de sa hauteur, une arène ovoïde, composé en pierres et en briques, se prolonge par-delà ses gradins, vers un petit théâtre, fort de sa cavea verte et humide. Lovée en demi-cercles autour de l’orchestra, une troupe de danseurs juvéniles y répète ses gammes. Assis sur les degrés, penchés sur les rebords des anciens corridors, sans leurs voûtes d’antan aux bouches servant de dégueuloirs, l’atmosphère de travail, l’exigence du metteur en scène, les corps pliés et courbaturés des différents protagonistes, redonnent une vie inespérée au lieu de spectacle.

Puis, dans le silence à nouveau, derrière des clôtures de murs masquant l’arène sableuse de l’amphithéâtre, le centre du municipe dévoile difficilement ses mystères. De la basilique, peu d’éléments subsistent, les plus intéressants se trouvant dans une chétive chiesa voisine, où il semble reconnaître quelques dalles de marbres travaillées, des rondins de colonnes cannelées, ou encore une ou deux figurations symboliques destinées à embellir les anciens édifices. Dans la tabula rasa à l’œuvre depuis l’Antiquité, perchés sur leurs stylobates, soutenus par des arcs accueillant les anciens tabernae, deux temples jumeaux, bordés sur une des faces de plaques en marbres roses, dominent l’attraction majeure du site, la via Flaminia.

Véritable axe d’expansion d’un front pionnier, route carrossable, toujours pourvue de ses pavés plus ou moins travaillés, elle scinde l’ancienne cité en son milieu, la coupant comme une brèche laissée par une rivière maintenant tarie. Sur son bosselage plus ou moins gonflé, sur ses pierres par moment désarticulées, on se hisse jusqu’au sommet de la légère pente dominant la ville ; les yeux rivés à terre, le regard parfois plus lointain, admirant la régularité de sa ligne. Se pensant arrivé au bout de la voie praticable, alors que chaque pas rappellent ceux effectués sur la via sacra traversant le forum impérial, voilà une arche inattendue chevauchant le chemin ancestral ; un arc, dépourvu de ses deux portiques latéraux, mais dont la magnificence se perpétue sous un aspect sobre, solide, malgré les accumulations liées à son âge. Il daterait des débuts de l’Empire, se situant à l’extrême fin de l’ancienne colonie ; la rue, une fois passée la porte de la cité, donnant la vision de deux colossaux sépulcres bordant le chemin public…

 

Suivant : Amélia, la cité des géants

 

 

----------------------------------------------------------------

Vidéo : reconstitution de Carsulae